Posons les bases d’une histoire
Lorsqu’on débute en écriture créative, la question qui revient chez mes élèves débutants, c’est “par où commencer ?“. Il existe des tas de méthodes mais aucune recette miracle. Chaque personne est différente. Il s’agit de tester pour trouver celle qui vous convient.
Je vous propose aujourd’hui la méthode des 5 questions que j’utilise aussi bien avec les enfants, les adolescents que les adultes. Pourquoi ? Parce que les réponses à ces cinq questions constituent le ciment d‘une intrigue. Elles permettent d’obtenir un aperçu de l’histoire que vous souhaitez développer et surtout, vous permettra ensuite de réfléchir au genre dans lequel votre intrigue se développera le mieux.
Niveau : débutant
Pré-requis : aucun
Durée de lecture :
≈ 6 minutes
Qui ?
Vous l’aurez compris, cette question concerne les personnages. Qui est votre héros ? Est-ce un homme, une femme, un enfant ? Quelles sont ses particularités ? A-t-il des pouvoirs magiques ou bien est-il très rationnel ? Quels sont ses traits de personnalités qui font qu’il a la carrure d’un héros ? Ou à l’inverse, décrivez tout ce qui ne le prédestinait pas à devenir le héros d’une histoire. L’objectif ici n’est pas d’entrer dans une psychologie profonde de votre personnage principal, cela viendra après. Il s’agit juste d’une esquisse, un brouillon qui donne une image générale.
Parmi les potentiels personnages secondaires, il s’agira de trouver des amis à votre héros, des personnes qui l’aideront dans l’intrigue. Évidemment, il lui faudra aussi un ennemi ou du moins, des opposants.
Exemple. Sir Arthur Conan Doyle a créé le personnage de Sherlock Holmes, un héros détective privé. Il lui a adjoint un ami fiable et de qualité, le Docteur Watson, et un ennemi juré, l’insaisissable criminel, le Professeur James Moriarty.
Quand ?
La question de la temporalité est extrêmement importante. Il est essentiel d’y réfléchir en amont. Pourquoi ? Parce qu’une histoire qui se déroule au Moyen-Âge nécessitera par exemple d’adapter les dialogues, les relations entre les personnages selon les convenances sociales de l’époque, et bien entendu, le contexte historique qui supposera des recherches. Votre héros ne pourra pas se sortir d’un problème par un appel sur son portable !
Si votre histoire se déroule dans le futur, il s’agira de faire preuve d’imagination : user de vos connaissances technologiques actuelles et anticiper, imaginer les futures inventions ou tout simplement, de quelles façons la technologie pourrait être poussée à l’extrême.
Même si vous créez une histoire qui se déroule de nos jours, à plus ou moins dix ans près, il s’agira de prendre en compte éventuellement l’actualité ou du moins, la saisonnalité de votre histoire. Si l’intrigue se déroule durant l’été, votre héros sera peut-être en vacances et donc plus libre dans ses actions qu’en pleine période de fêtes, a fortiori s’il est commerçant !
Exemple. Tatiana de Rosnay, dans son roman Les fleurs de l’ombre, place son intrigue dans un futur proche indéfini. Elle s’inspire de la technologie actuelle et imagine son évolution dans une vingtaine d’années, avec les répercussions sur son héroïne. De même, elle tient compte de la problématique du réchauffement climatique et de l’actualité pour créer son cadre.
Où ?
Le lieu : une autre question essentielle. Est-ce un lieu imaginaire dans un monde parallèle ? Ou bien ce lieu est bien réel ?
S’il est imaginaire, laissez libre cours à votre créativité mais… n’oubliez pas de créer une carte géographique, afin de vous y retrouver, avec une topographie vraisemblable : régions montagneuses, des plaines, des villes, petites et grandes, des ports, des fleuves, la mer ou l’océan… Exemple. J.R.R. Tolkien a complètement inventé les lieux du Seigneur des anneaux.
Si le lieu est réel, quel est-il ? Attention ! Choisissez l’emplacement en fonction des besoins de votre intrigue et non juste pour le rêve qu’il connote dans votre imaginaire. Exemple : Dan Brown a placé principalement à Rome l’intrigue de son roman Anges et démons… mais parce que son histoire concerne le Vatican, pas juste pour le plaisir.
Si vous choisissez un lieu réel, assurez-vous de le connaître ou de pouvoir le visiter. Il existe certes des écrivains capables d’inventer des histoires se déroulant dans des lieux qu’ils ne connaissent pas. Toutefois, c’est beaucoup plus compliqué et cela nécessite un travail de recherches plus poussé.
Pourquoi est-ce important ? Réponse par l’exemple. Je lus un jour une romance dont l’intrigue se déroulait en Sicile. Les descriptions étaient constituées de clichés, d’idées reçues voire parfois, d’éléments faux. Comment je le sais ? Parce que je connais la Sicile. Résultat ? Ma lecture était perturbée, je me suis sentie agacée et l’intrigue a perdu tout mon intérêt.
Quoi ?
Cette question correspond à l’objet de l’intrigue, son sujet. En d’autres termes, de quoi ça parle ? Qu’arrive-t-il à votre personnage ? Quel sera le thème principal de l’histoire ?
Il est important de répondre à cette question car cela vous aidera à déterminer le registre et / ou le genre de votre histoire. Votre personnage est témoin d’un crime, sa vie est menacée, la situation est tendue et il doit s’en sortir par ses propres moyens ? Votre histoire entrera dans la catégorie des thrillers. Votre héros est lieutenant de police scientifique ? Votre intrigue appartiendra au genre policier. Votre héroïne est une célibataire qui cherche l’amour ? Votre histoire sera une romance.
Ainsi déterminer le sujet principal de votre intrigue vous permet de décider comment vous la développerez. L’histoire mérite-t-elle un long roman ? Ou bien serait-elle plus efficace dans une nouvelle ? Si vous misez sur beaucoup de dialogues, ne vaudrait-il pas mieux vous tourner vers l’écriture théâtrale pour cette intrigue ?
Exemple. Les liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos est un roman épistolaire : il n’est constitué que de lettres. C’est au travers de cette correspondance fictionnelle que l’on découvre les manipulations et jeux de pouvoir fomentés par la Marquise de Merteuil et le Vicomte de Valmont.
Comment ?
Il s’agit ici de chercher à comprendre les principales péripéties que vivra votre héros. Idéalement, il en faudrait trois et les ranger par ordre croissant : de la moins importante à la plus forte. L’épreuve la plus compliquée se place vers la fin. C’est ce qu’on appelle le climax, c’est-à-dire le point culminant de la tension pour le héros, et par extension, pour le lecteur. Et puis si possible, une chute (fin) surprenante.
Comment le héros va-t-il s’en sortir ? Comment va-t-il découvrir la vérité ? Comment va-t-il prouver son innocence ? C’est à vous de compléter la question en fonction de votre intrigue, de l’objet de votre histoire.
Exemple. Dans le roman Hunger Games, de Suzanne Collins, comment Katniss Everdeen survit-elle aux “jeux” ?
Exemple. Dans Orgueil et préjugés, de Jane Austen, comment Elizabeth Bennett et Monsieur Darcy vont-ils finir par s’entendre et se marier ?
Exemple. Dans Un cri dans la nuit, de Mary Higgins Clark, comment Jenny Mac Partland, l’héroïne, va-t-elle s’en sortir saine et sauve ?
Outil : la carte mentale
Cette étape dans la création d’une histoire relève du brainstorming, c’est-à-dire du questionnement pour obtenir un maximum d’idées. Je rappelle qu’il ne s’agit pas encore d’entrer dans la construction de l’intrigue mais juste de faire un inventaire de vos idées.
Afin de les organiser, et pour éviter les détails qui ne sont pas utiles à cette étape, je conseille l’utilisation de la carte mentale. Il s’agit d’un outil extraordinaire qui permet d’avoir une vision globale de l’histoire en création. Je l’utilise pour ma part très souvent, tant dans le cadre de l’écriture d’invention que de la création de projets professionnels. Ajoutez des couleurs, des flèches, faites-vous plaisir !
J’affectionne particulièrement le papier et les feutres à cette étape. Toutefois, il existe de nombreuses applications qui vous permettront de réaliser de belles cartes mentales de qualité.
Conclusion
Ces questions, en apparence anodines, représentent les clefs d’une intrigue. D’ailleurs, lorsqu’on souhaite résumer un livre qu’on a lu, ce sont ces mêmes questions que l’on se pose en premier. Elles sont utiles tant pour la compréhension de la lecture que pour la conception d’une histoire.
L’exercice des 5 questions est très facile et permet de questionner votre créativité. Utile pour les écrivains qui débutent comme pour les plus avertis, en quête d’inspiration ou d’idées nouvelles. Vous pouvez commencer par la question qui vous parle le plus : il n’y a pas d’ordre précis. Un roman peut naître d’un personnage comme d’un lieu, d’une temporalité, d’un objet ou d’un objectif.
Exemple. J.K. Rowling a eu l’idée de Harry Potter lors d’un voyage en train de Manchester vers Londres. Le personnage du jeune sorcier s’est imposé à elle : un petit garçon rejoignant une école de magie.
